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reconstruction

  • Un été sans les hommes, de Siri Hustvedt

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    Babel, Actes Sud mai 2013, Siri Hustvedt

    Où comment parler de folie, d'attachement, de séparation et du temps qui passe avec humour et finesse. Regard tendre, écorché et attentif pour écrire la solidarité entre femmes.

    Mia la poétesse était mariée à Boris le neuroscientifique. Mais celui-ci s'est mit en mode "pause" avec une jeune française. Immense choc. Mia traverse alors un épisode de folie et décide à sa sortie d'hôpital de se réfugier près de sa mère pour l'été. Pendant cette saison lumineuse, elle va côtoyer différentes générations de femmes et doucement retrouver un équilibre. Entre les pensionnaires de la maison de retraite où elle rend visite à sa mère, le groupe d'adolescentes pour qui elle anime un atelier de poésie et sa jeune voisine, mère dévouée au mari difficile, Mia écoute, oberve et tisse des liens, elle devient de plus en plus consistante, elle retrouve des certitudes. Elle se retrouve en s'ouvrant aux autres.

    La narratrice alterne les moments de récits, les appartés directes au lecteur, la conversation en pointillés avec son mari qui n'a pas dit son dernier mot, des extraits d'un récit sur sa vie sexuelle, les séances téléphoniques avec sa psy, le contact avec sa fille ou un mystérieux correspondant anonyme. Ce mélange déjà étourdissant s'alourdit encore de digressions. Le texte comprent en effet de nombreux extraits littéraires, poétiques, philosophiques ou même scientifiques. Mais la conversation reste éveillée, directe, et l'auteur est attentive à garder le lecteur à ses côtés avec des détours inattendus par l'humour et l'irrévérence. On se pose avec elle des questions sur les répétitions, les romans de Jane Austen et la pression paternelle. On joue à la poupée. On s'attache à ces vieilles dames émouvantes qui font face à la vieillesse ou à des jeunes filles  fragiles, cruelles et pleines d'espoirs à la fois. On accompagne Mia dans son parcours jalonné dans le texte de quatre illustrations comme autant d'étapes dans la reconstruction. On touche du doigt le pouvoir consolateur de l'écriture et du soutien entre femmes.

    Si l'on n'abandonne pas la lecture, si l'on n'abandonne pas Mia en cours de route, l'histoire finit bien, le lecteur (la lectrice?) est ravi, voire apaisé. Et même si parfois je sentais mes épaules bien lourdes devant tant de pistes, je n'ai pas abandonné! ;) (Mais je conseille du temps et du calme à ceux qui tentent l'aventure, et j'imagine bien que les digressions peuvent lasser.)

    Siri Hustvedt est une féministe qui a elle-même été professeur d'écriture dans un établissement psychiatrique, qui a étudié les neurosciences, la philosophie et la poésie. Qui est aussi la femme d'un homme célèbre (qui lui fait peut être de l'ombre?) C'est surtout ici l'auteur d'un roman d'abord blessé puis optimiste sur une résurrection au carrefour de différentes générations, dans le sein des femmes.

    "rien n'est répété exactement, même les mots, parce que quelque chose a changé dans celui qui parle et dans celui qui écoute, parce qu'une fois les mots dits et puis redits encore, la répétition elle-même les altère "


    Siri Hustvedt - Un été sans les hommes par Librairie_Mollat